21 mai 2023

Yemaya vient nous rejoindre au petit port de Finikas où nous sommes arrivés en fin de matinée.

Le monde maritime est petit... A tribord, nous sommes à côté de Nadine et Freddy, sur Citius, battant pavillon belge :

et à bâbord, Philippe et Lydie sur Yemaya avec un couple d’amis !

Température toujours frisquette pour la Grèce et bien que les eaux soient limpides, personne n’est tenté par la baignade…

23 mai 2023.

Nous quittons Syros à destination de Serifos.

Vent trois quarts arrière et Bellisa file sur l’eau.

Le vent monte : 1 ris dans la grand voile et génois réduit pour rejoindre le mouillage d’Ormos Koutala, où les rafales catabatiques sont violentes.

Ce n’est qu’en fin de journée que le vent se calme ce qui nous permet de passer une nuit sereine dans un bel environnement.

24 mai 2023 :

Ayant lu que l'île de Serifos avait un passé minier important, nous comprenons mieux les vestiges visibles depuis notre mouillage.

Serifos est connue depuis l'Antiquité pour ses mines d'où l'on extrayait le minerai de fer.

Successivement sous l’influence des Athéniens et des Macédoniens , l'île devient romaine en 146 av. J.-C.. Les empereurs romains l’utilisent alors comme lieu d’exil pour des criminels d’État, employés aux mines de fer.

Après la quatrième croisade, les Vénitiens s’emparent de l’île, la fortifient et continuent ou reprennent l’extraction du fer.

À l’issue de la guerre d'indépendance grecque, l'île rejoint le royaume de Grèce. L'exploitation des mines reprend au cours du XXe siècle, par la « Société des mines de Seriphos-Spiliazeza », sous l’égide du minéralogiste allemand Emil Grohmann.

Pour en apprendre davantage, nous quittons Ormos Koutala pour le mouillage dans l'anse de Mega Livadi.

La sortie est plus calme que notre arrivée de la veille...

Sur les 5 miles nautiques qui nous séparent de notre prochain mouillage, nous découvrons une côte très particulière.

La petite baie de Mega Livadi est très belle, surtout par cette journée ensoleillée et non ventée. Les quelques riverains ne sont pas à plaindre.

Pendant que le capitaine godille jusqu'à Yemaya, Lydie étrenne la nouvelle annexe de son bord.

Dans l'après-midi, les équipages de nos deux voiliers se rejoignent à terre.

Le paysage est empreint du patrimoine minier et nous partons à sa découverte.

De petites maisons en ruines sur la colline sont peut-être celles qui hébergèrent les familles de mineurs.

Nous trouvons l'entrée d'une galerie dans laquelle nous nous engageons, munis de lampes frontales et imaginons aisément les conditions de travail des mineurs du début du siècle.

Sérifos fut le théâtre, en pleine Première Guerre mondiale, d’un conflit social retentissant. En 1916, à la suite du refus de la compagnie de ré-embaucher des mineurs démobilisés, mais aussi à cause de l’insécurité dans les galeries et des horaires allant jusqu’à 16h par jour pour des salaires très bas, les 460 mineurs se mirent en grève.

Konstantinos Speras, natif de l’île mais anarcho-syndicaliste éduqué sur le continent, se fit leur porte-parole. Les directeurs refusèrent toute concession et en appelèrent aux autorités qui envoyèrent à Sérifos un peloton d'une trentaine de gendarmes venu de l’île voisine de Kéa. Sommations et négociations ayant échoué, les gendarmes se mirent à tirer sur les grévistes faisant quatre morts et douze blessés.

Les ouvriers se replièrent sur l’embarcadère de Megalo Livadi, bloquant ainsi le chargement des cargos. Alertée par les épouses des mineurs, la population prenant le parti des grévistes, attaqua les gendarmes à coups de pierres et de fusil, en tuant trois et blessant les autres.

La marine grecque envoya dans l’île un navire de guerre avec un détachement d’infanterie de marine qui réussit à capturer Speras (accusé de haute trahison en raison de la guerre, il fut libéré avant d’être jugé grâce à la chute du gouvernement, d’ailleurs liée à cette affaire).

Craignant la contagion sur le continent, le nouveau gouvernement grec obligea la « Société des mines de Seriphos-Spiliazeza » à faire des concessions, la direction fut changée et les régime des « trois-8 » fut instauré, ce qui généra de l’embauche ; les salaires furent améliorés. La société resta largement bénéficiaire jusque dans les années 1950, lorsque le site commença à s’épuiser.

Une stèle rend hommage aux quatre mineurs tués.

Retour vers nos fiers navires en savourant notre chance de bénéficier de quiétude et de douceur de vivre, ce qui ne fut pas le cas à toutes les époques dans ce beau lieu...