Cap sur Cabrera !

Nous avions déjà, lors de notre préparation hivernale, repéré cet archipel au sud de Majorque...

Classé parc national maritime et terrestre, il est composé d'une île principale, Cabrera, et de 18 autres petites îles soit plus de 10 000 ha d'îlots calcaires et de fonds marins. Il faut solliciter une autorisation de navigation, ce que nous avions fait depuis Pentoulan.

Compte-tenu de sa riche faune et d’une flore rare, parfois avec des espèces endémiques à l’archipel, seule la grande baie très protégée de Puerto de Cabrera est équipée de bouées permettant l’amarrage et pour lesquelles il convient aussi de prendre une réservation selon la taille de son bateau. Un garde du Parc vient vérifier si tout le monde est en règle : pas de mouillages possibles donc les fonds marins sont préservés.

L’approche de Cabrera est déjà spectaculaire : après avoir contourné le Cabo Lleibeig, on découvre l’anse de Puerto de Cabrera, dominée par un château du XIVe qui fut construit pour défendre l’île des pirates venant d’Afrique du Nord et de Turquie.

Véritable havre de paix, cette grande baie protégée s’annonce prometteuse de moments de quiétude !

Effectivement, les bateaux sont éloignés les uns des autres et l’atmosphère de l’île incite à la tranquillité.

Petit salut d’un dauphin au réveil... puis nous partons en annexe jusqu’à l’unique cale pour débarquer sur l’île. Un petit groupe de maisons blanches autour d’une petite place, telle un campement : autrefois, il s’agissait d’un petit village de pêcheurs.

De nos jours, seuls deux petits bateaux de pêche traditionnelle artisanale sont autorisés, ce qui dénote un fort souhait de préservation de la faune marine.

Après nous être imprégnés de l’ambiance des lieux, nous gravissons la colline pour nous rendre au château dont la silhouette fait partie intégrante du paysage.

Vue superbe sur la baie et les environs couverts de garrigue, de maquis ou de pinèdes. Seuls quelques sentiers sont ouverts aux promeneurs, l’essentiel de l’île étant totalement sauvage : 1500 ha de montagnes, de falaises, de caps, de plages et de grottes...

Puis, nous poursuivons notre balade sur les sentiers le long de la grande baie.

Pas étonnant que la vie végétale et animale y soit très riche avec des espèces endémiques comme le lézard des Baléares :

Nous découvrons aussi le goéland d’Audouin. Ce dernier, plus petit que nos goélands argentés, a un grand bec rouge à bout noir et des pattes foncées. Son cri diffère également de celui de son cousin, plus plaintif, moins criard !

Les oiseaux de proie comme l’aigle pêcheur, le faucon pèlerin et le faucon Eleonora se complaisent également dans ces lieux.

Les eaux sont limpides et nous permettent de profiter des poissons sur fond de sable et de posidonies.

La posidonie n'est pas une algue mais une plante à fleurs sous-marine. Ses peuplements ressemblent à des prairies. L'herbier de posidonie est non seulement un lieu de vie et d'alimentation pour de nombreux poissons, mais aussi une frayère et une nurserie importantes.

Selon les heures de la journée, nous profitons de toutes le nuances de bleu et de turquoise !

Mais, les hommes ont eux aussi fréquenté l’île qui était habitée dès les temps préhistoriques.

Notre visite d’un petit musée ethnologique nous renseigne sur les céramiques et pièces de monnaie romaines et byzantines découvertes sur l’île, puis l’installation de moines qui profitèrent largement des lieux, à tel point que le pape Clément ne tolérait plus la vie libérée... de la communauté monastique ! Ont également vécu sur Cabrera des pêcheurs, des paysans, des gardiens de phare, des scientifiques, des militaires...


Cabrera fut le théâtre d'un des épisodes les plus tragiques des conquêtes de Napoléon. Pendant cinq ans, de mai 1809 à mai 1814, cette île servit de prison, à près de 9 000 soldats de l’Empire, après la défaite de la bataille de Bailén. Oubliés des autorités espagnoles qui les laissèrent croupir dans les pires conditions, ces soldats vaincus, déshonorés, furent totalement et volontairement oubliés par la France. Les deux tiers moururent de maladie ou de faim. Ils sont enterrés près du château et un mémorial est érigé au centre de l'île.

Avant la première guerre mondiale, Cabrera fut une île privée. Mais le gouvernement espagnol la réquisitionna en 1915. Une petite garnison y fut établie et est encore présente de nos jours.


Sous le charme de l'archipel, nous décidons d'y séjourner plusieurs jours, loin de la foule des touristes.

Nous consacrons une journée à faire, en bateau, le tour de Cabrera avec une pause à midi dans la seule anse où l'arrêt est autorisé en journée. Succession de paysages sauvages pour notre plus grand plaisir !

Une matinée de kayak pour explorer tous les recoins de Puerto de Cabrera... car, nous avons embarqué à bord un kayak gonflable que nous étrennons dans l'anse.

Nous ne regrettons pas d'avoir consacré du temps à découvrir cet archipel et lui décernons un nouveau coup de coeur indéniable !